T2 - Chapitre 1 : la fin de la Seconde Guerre mondiale et les débuts d'un nouvel ordre mondial (1944-49) (première partie)

Publié le 2 Avril 2024

Thème  2 – LA MULTIPLICATION DES ACTEURS INTERNATIONAUX DANS UN MONDE BIPOLAIRE (DE 1945 AU DÉBUT DES ANNÉES 1970)

 

Chapitre 1 : la fin de la Seconde Guerre mondiale et les débuts d'un nouvel ordre mondial (1944-49)

 

Churchill, Roosevelt et Staline lors de la conférence de Yalta en février 1945.

 

=> Comment construire une paix durable après la guerre ?

=>  Sur quelles fondements établir  le nouvel ordre politique, économique et social?

=> Pourquoi de nouvelles tensions apparaissent-elles ?

 

 

I - LE BILAN DE LA GUERRE : UN MONDE MEURTRI.

 

A - Une catastrophe humaine et matérielle sans précédent.

 

1. L'effroyable bilan humain.

 

La 2nde Guerre mondiale a entrainé la mort de plus de 60 millions de personnes dans le monde. Un bilan effroyable qui dépasse de loin celui des conflits précédents.

- plus de la moitié des morts sont des civils, victimes des bombardements de masse, des déportations et des massacres.

- les pays les plus touchés sont l'URSS qui compte plus de 25 millions de morts, la Chine (environ 20 millions), l'Allemagne (8 millions), la Pologne (5,7 millions dont 5,5 millions de civils) et le Japon (2,7 millions).

- les nazis ont exterminé environ 6 millions de juifs (les 2/3 de la communauté juive d'Europe, plus de 90% des juifs polonais) et 200 000 tsiganes.

 

Le bilan humain de la Seconde Guerre mondiale.

 

2. Des millions de réfugiés et de déplacés.

 

La guerre a également provoqué de vastes transferts de population, notamment en Europe orientale et en Chine.

- On estime à environ 30 millions le nombre de personnes déplacés pendant la guerre.

- Des millions d'européens se retrouvent également sur les routes en 1945 : prisonniers libérés, survivants des camps, civils ayant fui les combats ou la "colonisation" nazie... Des milliers de personnes ne survivront pas à ce long périple du retour.

- Des millions de personnes sont déplacées de force après des changements de frontière en Europe orientale. C'est par exemple le cas pour environ 10 millions d'allemands rapatriés de Pologne et de Tchécoslovaquie, ainsi que pour 1,8 millions de polonais des régions lituaniennes, biélorusses et ukrainiennes rétrocédées à l'URSS.

 

Modification des frontières en Europe et mouvements de population dans l'immédiat après-guerre.

 

3. Un monde en ruine.

 

Les destructions matérielles sont énormes : des villes entières sont détruites, ainsi que des infrastructures de transports, des ports, des usines etc.

- 70% des villes allemandes sont en partie dévastées par les bombardements et les combats. C'est également le cas en Pologne et au Japon.

- 45% des lignes de chemin de fer sont hors d'usage en France, 75% en Pologne.

- en URSS, près de 30 millions d'individus sont sans logement.

 

Les ruines d'Hambourg, 1945

 

Ces destructions ont également provoqué la désorganisation et l'effondrement des économies :

- dans de nombreux pays, les productions industrielles et agricoles sont beaucoup faibles qu'en 1939 (la production industrielle a par exemple chuté de près de 40% en France)

- les pénuries de nourriture affectent durablement les populations. En France par exemple, les tickets de rationnement pour le pain mis en place en 1940 sont prolongés jusqu'en novembre 1949.

- seuls les États-Unis, qui n'ont pas connu de combat sur leur sol (à l'exception de Pearl Harbor), ont modernisé et augmenté leur production industrielle (multipliée 2 par rapport à 1939).

 

Ticket de rationnement pour le pain, France, mars 1949.

 

B - Le traumatisme moral et la poursuite des violences.

 

1. Des consciences meurtries

 

La guerre et ses horreurs ont par ailleurs profondément meurtri les consciences et causé un traumatisme sans précédent : 

- entre août 1944 et janvier 1945, les alliés libèrent les camps de concentration et d’extermination. Même si des informations circulaient depuis décembre 1942, la découverte des camps plonge les sociétés dans l'horreur de la politique génocidaire nazie.

- plus encore qu'après la Première Guerre mondiale, le monde découvre que la science et le progrès technique peuvent être mis au service de la destruction de masse, comme avec la bombe atomique utilisée contre le Japon.

- les mémoires et les consciences sont enfin marquées par les exactions commises par les différentes troupes, en particulier allemandes (comme à Oradour-sur-Glane) et japonaises (dans le cadre de l'opération Sankō Sakusen - les "Trois Tout" - : "tue tout, brûle tout, pille tout").

 

Libération du camp d'Auschwitz-Birkenau le 27 janvier 1945.

 

2. De nouvelles formes de violence dans l'immédiat après-guerre.

 

Les populations, déjà meurtries par des années de conflit et d'occupation, sont parfois confrontées à de nouvelles violences dans l'immédiat après-guerre :

- des guerres civiles éclatent, comme en Chine ou en Grèce entre communistes et non communistes.

- des formes "d'épurations sauvages" sont mises en œuvre pour munir les collaborateurs, comme en France où ont lieu 10 000 exécutions sommaires et où 20 000 femmes sont tondues pour avoir couché avec l'ennemi.

- en URSS, les prisonniers libérés des camps allemands sont condamnés au goulag ainsi que de nombreuses minorités accusées d'avoir collaborées avec les nazis (au Caucase et en Crimée notamment)

 

Femme française rasée à la Libération, septembre 1944

 

II - UN MONDE A RECONSTRUIRE (1944-47)

 

A - Organiser l'après-guerre

 

1. Le règlement du conflit.

 

Avant même la fin de la guerre, les Alliés préparent le retour à la paix et la reconstruction lors de plusieurs conférences internationales.

- lors de la conférence de Yalta en févier 1945, Roosevelt, Staline et Churchill s'accordent sur la nécessité de remette en place la démocratie et d'organiser des élections libres dans les pays d'Europe libérés du nazisme.

- lors de la conférence de Potsdam, Truman, Staline et Attlee s'entendent (avec difficulté) sur le sort de l'Allemagne vaincue : occupation quadripartite, démilitarisation, démocratisation, dénazification et décartellisation.

- des changements de frontière sont également décidés en Europe de l'est au profit de l'URSS annexe les pays baltes, les Balkans et la Pologne. Cette dernière voit sa frontière occidentale déplacée vers l'ouest au détriment de l'Allemagne.

- en Asie, le Japon perd tous les territoires conquis depuis 1931, dont la péninsule coréenne, coupée en deux zones d'occupation (américaine et soviétique)

 

 

La division de l'Allemagne et de Berlin en zone d'occupation.

 

2. Juger les vaincus.

 

Face aux atrocités de la guerre, punir les coupables devient un impératif moral et politique. Les responsables allemands et japonais sont alors jugés par des tribunaux militaires internationaux dont les statuts sont fixés par les accords de Londres en aout 1945.

- 22 chefs militaires et politiques nazies sont jugés par les puissances victorieuses (États-Unis, Grande-Bretagne, France, URSS) lors du procès de Nuremberg (nov. 1945-oct. 1946). Ils sont accusé de crimes contre la paix, de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité, une nouvelle notion juridique définie en aout 1945.

- 28 responsables japonais, dont le général Tojo, sont jugés lors du procès de Tokyo (mai 1946-novembre 1948) par des représentants de 11 nations alliées. Tous les accusés sont déclarés coupables. L'empereur Hiro-Hito, échappe au procès, les États-Unis voulant le maintenir sur son trône pour éviter des troubles dans le pays.

- la dénazification de l'Allemagne est loin d'être simple : de nombreux dirigeants nazis ont réussi à fuir le pays, d’autres parviennent à dissimuler leur passé et ne sont pas inquiétés, certains continuent même à exercer des fonctions politiques et administratives...

 

Le procès de Nuremberg

 

B - la reconstruction matériel et la mise en place d'un nouvel ordre économique et social.

 

1. La réorganisation du système économique mondial.

 

Pour  les États-Unis, grand vainqueur du conflit, une paix durable n'est possible que dans un contexte de prospérité économique. Dès 1944, ils assurent la mise en place d'un nouvel ordre économique mondial basé les principes du capitalisme libéral.

- Les accords de Bretton Woods consacrent la domination américaine : signés en juillet 1944 après de longues négociations entre les 44 pays alliés, ils fondent un nouveau système monétaire international basé sur le dollar. Ils instaurent un régime de parités fixes entre les monnaies dont la valeur est fixée par rapport au dollar, seule monnaie convertible en or. La devise américaine devient la monnaie de référence et la clé de voute de la stabilité monétaire internationale.

- les accords de Bretton Woods insituent également une Banque Internationale pour la Reconstruction et le Développement (la BIRD) afin d'aider les pays en difficultés et un Fonds Monétaire International (FMI) qui doit garantir la stabilité du système monétaire international.

- la conférence de Bretton Woods donne par ailleurs naissance au General Agreement on Tariffs and Trade (GATT) en 1947, série d'accords qui vise à favoriser le libre-échange en réduisant et en harmonisant les taxes douanières.

- très active à Bretton Woods, l’URSS n’adhère cependant à aucune des deux instances et préfère créer un système spécifique à l’Est.

 

Les économistes John Maynard Keynes (GB), favorable à un système monétaire mondial fondé sur une devise non nationale appelée le "bancor",  et Harry White (US) qui souhaitait rétablir le Gold Dollar Exchange. Les accords de Bretton Woods sont un compromis entre les deux visions.

 

2. La triomphe de l’État-providence.

 

Au sortir de la guerre, les besoins et les attentes des populations sont immenses. L'idée s'impose que c'est aux États d'assurer le bien-être et la justice sociale en pourvoyant aux besoins essentiels des citoyens (santé, éducation, retraite...). L’État-providence s'impose progressivement.

- la notion d’État-providence est inspirée des politiques du New Deal (mises en œuvre par Roosevelt dans les années 1930 d'après les travaux de J.M. Keynes) ainsi que du rapport de l'économiste britannique William Beveridge (1942) qui insiste sur la nécessité d'une protection sociale universelle.

- de nombreuses mesures sociales sont prises en Europe après la guerre. Le Royaume-Uni instaure par exemple un système d'allocation familiales en 1945 et un système d'assurance maladie en 1946.

- en France, ce sont ces mêmes principes qui inspirent le programme du Conseil National de la Résistance (CNR) de 1944, base de l’État-providence français . L'accord se fait sur la nécessité de refonder la légitimé républicaine, en proclamant de nouveaux droits politiques et sociaux : droit de vote des femmes en avril 1944, Sécurité Sociale 1945, salaire minimum en 1950...

- Les États interviennent largement dans la reconstruction, notamment en France par la nationalisation des secteurs clés de l'économie (énergie, institut de crédit, transport...) et par la création d'un Commissariat Général au Plan en 1946 (dirigé par Jean Monnet) qui définit des priorités dans la politique de modernisation et de relance. L'État prend enfin en charge la reconstruction matériel du territoire. C'est par exemple le cas dans la ville du Havre, presque entièrement détruite par les bombardements, dont la reconstruction est confiée par le Ministère de la Reconstruction et de l'Urbanisme à l'atelier d'Auguste Perret, architecte français spécialiste du béton armé.

 

Les membres du bureau du Conseil national de la Résistance autour de son président Georges Bidault.

 

Affiche pour la sécurité Sociale, France 1947

 

C - La création de l'ONU

 

1. La défense de la démocratie et du droit international.

 

Roosevelt s'inscrit dans la tradition et l'héritage de Wilson (à l'initiative de la SDN). Il souhaite créer un nouvel ordre mondial fondé sur le droit international et le principe de la sécurité collective.

- Il exprime cette ambition (avec Churchill) dès la Charte de l'Atlantique de 1941. Ce texte sert de base à la Charte des Nations Unies, signée par 51 États à San Francisco le 26 juin 1945.

- l'ONU se donne pour mission première de garantir la paix en empêchant la guerre. Toutefois, elle se donne aussi pour objectif de défendre la démocratie et les droits de l'homme ainsi que de favoriser le progrès économique et social par l'intermédiaire d'institutions spécialisées de coopération intergouvernementale (comme la Food and Agricultural Organization, L'UNESCO, l'Organisation Internationale du Travail (OIT) ou encore celle de la Santé (OMS).

- L'Assemblée générale regroupe les délégués de tous les États membres, lesquels disposent chacun d'une voix. Sa compétence s'étend à tous les domaines évoqués dans la charte.

- l'ONU se dote par ailleurs d'une force d'intervention (d'interposition), les Casques Bleus, formée de contingents des différents pays membres de l'organisation

 

Préambule de la charte de Nations Unies

 

2. Une ordre mondial dominé par les vainqueurs de la guerre.

 

L'ONU apparaît dès sa fondation comme le reflet du nouveau rapport de force international. Les 5 grandes puissances victorieuses y occupent un rang prépondérant, en particulier les États-Unis et l'URSS.

- le conseil de sécurité, l'instance de décision de l'ONU, est dominée par les vainqueurs (États-Unis, URSS, Chine, Grande-Bretagne et France) qui disposent d'un siège permanent et peuvent bloquer son fonctionnement grâce à leur droit de veto.

- l'installation du siège de l'ONU à New York (celui de la SDN se trouvait à Genève) témoigne du rôle que cherche désormais à jouer les États-Unis dans le monde.

 

Le fonctionnement de l'ONU

 

Vocabulaire :

 

BIRD - - charte - conseil national de la Résistance - commissariat au plan - crime contre la paix - crime contre l'humanité - dénazification - épuration sauvage - État-providence - FMI - veto.

Rédigé par Team Histoire-Géo

Publié dans #Term Histoire

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